Italie : Rokhaya Ba Touré, consul du Sénégal à Milan impliquée dans un micmac de 850 millions fcfa sur le dos de l’Etat
Une odeur de soufre pollue actuellement l’atmosphère au Consulat Général du Sénégal à Milan. Pour cause, la consule Général est secouée par un scandale de 850 millions de francs FCFA. Et comme d’habitude, tout est parti d’une bonne intention qui a tourné au fiasco. En effet, l’idée de départ était d’acheter l’immeuble qui abrite le Consulat Général du Sénégal à Milan.
Une idée louable qui s’est transformée en pratique très suspecte. L’immeuble de trois niveaux qui se situe à viale Certosa 187 à Milan et qui sert de cadre à la présentation consulaire de notre pays est en location depuis 2015 pour un montant qui avoisine les sept (7.000) euros par mois.
Les négociations, le contrat et les procédures d’achat ont été menés de main de maître par Rokhaya Ba Touré, consul Général du Sénégal à Milan. Les discussions ont abouti à la signature de l’accord de financement immobilier d’un montant d’un million trois cent mille (1 300 000) euros. Par cet acte, l’immeuble est désormais à inscrire dans le registre du patrimoine sénégalais à l’étranger.
Ainsi, elle a engagé le Sénégal dans une location-vente avec remise des payements des arrières dont elle seule est en mesure d’expliquer sa démarche. Une démarche courageuse qui a exclu les autorités étatiques de l’opération d’achat.
Un forcing qui passe mal
La diplomate, pour légitimer son forcing, s’est appuyée sur une réponse du Ministère des finances et du plan à son collègue des Affaires étrangères. C’est ce document qui a servi de prétexte à madame le consul général de passer à la formule « FAST TRACK ».
Elle s’est alors attachée les services d’un cabinet italien grâce aux conseils d’une compatriote qui travaille dans la banque italienne UNICREDIT. Elle contracte sur ce, un prêt de 850 millions de francs CFA, pour un crédit immobilier d’une durée de 15 ans. Ainsi, le Consulat Général du Sénégal à Milan acquiert auprès de l’agence immobilière Erreti Immobiliare, et devant la notaire Adele Raiola, qui officialise l’acte de vente le 1er août 2019, après 2 mois de négociation.
Tout semblait sur les rails jusque-là. Mais peu à peu, les suspicions sur un éventuel deal font sur face. Ces suspicions sont renforcées par une « pratique très suspecte, où les règles d’usage sont piétinées, et les procédures déroulées dans l’opacité la plus totale », se révolte un agent du Consulat.
Au Consulat Général du Sénégal à Milan, certains partisans de la diplomate brandissent une lettre d’accord du Ministère de l’Économie et des Finances pour justifier l’opération. Cette correspondance date du 07 septembre 2018, et signé par Birima Mangara, ministre du Budget, est une réponse à son collègue des affaires étrangères et des sénégalais de l’extérieur Sidiki Kaba, qui l’avait saisi dans cette opération.
A l’origine, une lettre de Birima Mangara
Dans ce document en notre possession, M. Mangara s’adresse à son collègue des affaires étrangères en termes : « comme suite à votre lettre par laquelle vous formulez une demande d’autorisation d’acquérir deux(2) immeubles destinés à abriter respectivement le siège de la chancellerie à Rome et un consulat général, en Italie, j’autorise vos services compétents, chacun en ce qui le concerne à engager les procédures subséquentes en rapport avec ceux centraux en rapport ceux du ministère des affaires étrangères et des sénégalais de l’extérieur».
Plus loin, l’ancien ministre du budget invite M. Sidiki Kaba, ancien ministre des affaires étrangères et des sénégalais de l’extérieur, de bien vouloir veiller sur les conditions substantielles de l’acquisition autour de deux grands accords. Le financement bancaire, et le payement de la facilité sous la modalité que chaque échéance correspond au loyer mensuel tiré des crédits budgétaires alloués par la loi des finances.
Ces échanges sous forme d’intention et de bonne volonté affichés des deux ministres, ont suffi à madame le consul général pour déclencher une procédure d’achat du siège du Consulat général du Sénégal à Milan. Une fois le pactole conclut, elle mettra deux mois pour en informer par lettre les autorités. Ce qui est incroyable, mais vrai. D’aucuns diront que c’est le monde à l’envers.
Opposition de l’ambassade du Sénégal à Rome
Dans le même temps, elle demande à l’agent comptable du Consulat, d’exécuter un virement bancaire au bénéfice de la banque italienne Unicredit. Voici textuellement la lettre adressée au payeur, comme si le Consulat est devenu par circonstance, ordonnancier des dépenses publiques.
« Suite à la lettre numéro 08608/MEFP/MDB/ du 17 septembre 2018 autorisant acquisition de la chancellerie, je viens par la présente vous informer de l’achat de la chancellerie sis à viale certosa 187 à Milan par l’Etat du Sénégal sur prêt bancaire pour une durée de 15 (quinze) ans.
Je vous envoie ci-joint le tableau d’amortissement afin d’éviter des retards de payement qui se feront désormais par virement bancaires auprès de la banque Unicredit. Les ordres de payements vous seront transmis à temps pour une bonne diligence. »
Saisi de l’affaire, l’agent comptable auprès de l’ambassade du Sénégal à Rome opposera un refus diplomatique à « l’ordre de paiement » qui d’après lui, est en contradiction avec la légalité. Ce refus de l’agent comptable à la représentation diplomatique à Rome a entrainé un blocage de l’opération depuis 2 mois.
Menace d’une plainte contre le Sénégal
Et c’est là que l’affaire risque de corser pour le Sénégal. Puisque l’agence immobilière italienne menace de traduire le Sénégal dans les juridictions compétentes italiennes pour « refus de payement et occupation abusive de locaux appartenant à autrui ».
Dans cette affaire, le montage financier est tout sauf professionnel. Car il ne prend pas en charge la maintenance des locaux. Pire, les sanctions sur le retard des payements qui figurent dans le contrat de bail vont étrangler notre pays. D’autre part, les amortissements ne sont pas favorables non plus pour une institution qui n’est pas un organe commercial, selon un expert italien que nous avons consulté.
« Un établissement de service public pourrait mieux négocier sur l’état de grâce et sur des amortissements plus flexibles », nous confie sous le sceau de l’anonymat cet expert. Parce que d’après lui, « à l’état actuel, tout le monde cherche à vendre ses biens immobiliers à cause de la crise et des locataires mauvais payeurs ».
Donc d’après cet expert, le Sénégal aurait pu mieux négocier parce que « Les agences immobilières professionnelles et même les intermédiaires ne rejettent plus les offres provenant des institutions qui parfois délivrent des lettres de garanties souveraines ou des facilités de payement ».
Silence de Madame Touré
Ce qui est intriguant et préoccupant dans cette opération, c’est que le Gouvernement est dans une optique de rationalisation des dépenses publiques. Mais au même moment, Madame Rokhaya Ba Touré s’est arrogée toutes les responsabilités de signer un contrat de bail aussi important que l’achat d’un immeuble en Europe en défiant l’autorité et en marge des instructions édictées dans ce sens.
Rappelons que dans un passé récent, l’ambassade du Sénégal à Rome avait identifié un local qu’il souhaitait acheter pour le compte du Sénégal. Mais les différentes missions de prospection et de vérifications de l’État avaient rejeté la proposition, demandant à la chancellerie de trouver d’autres endroits qui répondent mieux aux exigences de notre pays.
Au ministère des finances, nos tentatives de joindre un responsable de la DAGE, destinataire du courrier support de madame Touré, sont restées vaines. Les interlocuteurs qui ont accepté de nous parler sous l’anonymat disent ne pas être au courant d’une autorisation formelle de payement de leur département pour l’achat d’un immeuble en Italie.
Omerta aux Affaires étrangères
Nous avons joint madame le consul Rokhaya Ba Touré pour avoir sa version. Elle nous avait promis un rendez-vous téléphonique. Mais elle ne répond plus à nos appels ni aux messages WhatsApp qu’elle a pourtant lu. Nous lui laissons encore nos pages ouvertes et nos antennes disponibles pour mieux éclairer l’opinion
Au Ministère des affaires étrangères et des sénégalais de l’extérieur, c’est silence radio. Aucun responsable ne souhaite s’exprimer sur le dossier. Pourtant, face à cette situation, le Sénégal risque d’être trainé dans les tribunaux italiens si les autorités ne rectifient pas le tir, ce qui n’est pas encore trop tard.
Parce que le temps ne joue pas en faveur du Sénégal et il est urgent que la tutelle prenne position sur la question, sans quoi notre pays fera les choux-gras de la presse italienne.
MAME MOR NDIAYE : GROUPE MAACK ITALIE
Soyez le premier à commenter